Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
La Fleur d'Ecume
19 novembre 2007

chapitre 39 : deux étranges rencontres.

Chapitre 39 : Deux étranges rencontres.

 

Le lendemain de cette aventure, Lamimille négocia le droit de sortir seule : elle avait le droit à une heure le matin, et une heure l’après-midi. Non pas que Titine et ZeN ne lui faisaient pas confiance, mais des dangers planaient sur la jeune fille ; la femme aux gants dépareillés qui la leur avaient confiée avaient particulièrement insisté là-dessus.

Ce matin-là, elle décida d’explorer les alentours de la rue Ruinart de Brimont.

Les gamines, Dinah, Lucie et Zeineb, devaient aller à la danse. Une grève des bus les empêchaient d’y aller seules, aussi leurs frères – Rayann (le frère de Zeineb), Oscar (le frère de Lucie), David et Raphaël (les frères de Dinah) les accompagnaient-ils. Alors que les filles s’amusaient à tourner leurs grands frères en bourrique et que ces derniers les pressaient d’avancer, un homme étrange, vêtu d’un grand manteau qui lui couvrait les mains et laissait entrevoir ses chaussures, capuche rabattue sur son visage, le dos courbé par un lourd sac, fit irruption devant eux. Il respirait bruyamment, avec difficulté, et laissa soudain tomber son sac. Les gamins s’arrêtèrent net, intrigués. L’homme les compta, et murmura : « sept ! parfait ! », puis fouilla dans son sac : il en sortit sept autres sacs hermétiquement fermés, en confia un à chaque gamin.

« C’est quoi ?

N’ouvrez surtout pas ces sacs avant de l’avoir vue ! rugit l’homme. Vous devez lui donner ces sacs, dans un endroit où personne ne peut vous voir. Mais surtout, n’ouvrez pas les sacs avant de l’avoir vue !

Vue qui ?

Vous avez une nouvelle voisine depuis peu, je crois.

Euh, oui, enfin, plusieurs… Comment savoir à laquelle donner ces sacs ?

Vous la reconnaîtrez facilement : elle est belle, intelligente, rusée, intrépide, et parfois se conduit de façon totalement insensée. Elle porte toujours un médaillon prune autour du cou et des bracelets noirs au poignet gauche.

Mais pourquoi tu ne lui donnes pas toi-même ces sacs ?

Je n’ai pas le droit de l’approcher tant que… laissez tomber ça n’a pas d’importance. Je ne peux pas la voir pour le moment, c’est tout. Je n’ai même pas le droit d’être ici. »

Il ne cessait de tourner sa tête d’un côté et de l’autre, pour vérifier que personne ne l’espionnait. Soudain, il se tint le côté droit, plié par un point de douleur. Et lorsqu’il se redressa, sa capuche glissa. Les gamins reculèrent d’un pas, effarés. L’homme avait tout le côté droit du visage couvert d’écailles de poisson, ses yeux cernés brillaient terriblement, ses cheveux ressemblaient à des algues noires gluantes. Il les fixa droit dans les yeux l’un après l’autre, et sourit, certain qu’ils l’avaient compris.

« Je peux compter sur vous, je ne me suis pas trompé ?

Non, non, murmurèrent les gamins, tu ne t’es pas trompé, on la trouvera et on lui donnera les sacs.

Mais qu’est-ce qu’il y a dans les sacs ?

Rien qui te concerne, petite, répondit le jeune homme. Bon, je dois y aller. »

Il s’enfuit rapidement, furtivement comme un voleur.

« Bon, maintenant, il faut trouver cette nouvelle voisine pour lui donner ces sacs…

Je crois qu’on l’a trouvée…là ! »

Tous se tournèrent vers ce que pointait le doigt. Une jeune fille aux cheveux courts regardait fixement un cabanon fermé à clé derrière un grillage, ses chaussures à la main, pieds-nus dans la rue. Soudain, elle sembla se décider, et, comme si elle suivait le rythme d’une musique, laissa tomber sa chaussure droite, puis sa chaussures gauche, regarda à droite, à gauche, et partit à l’assaut du grillage. Les gamins se rapprochèrent.

Lamimille voulait savoir ce qu’il y avait dans ce cabanon. Elle avait fait le tour du grillage, et n’en avait pas trouvé la porte. Apparemment, il fallait d’abord entrer dans une des maisons du coin pour y accéder. Qu’à cela ne tienne, elle passerait par-dessus le grillage. Elle se souvenait d’avoir fait le mur des dizaines voire des centaines de fois. Elle avait beau être amnésique, les réflexes restaient des réflexes, comme manger, bouger, lire, écrire, dessiner, compter ou dormir. Seulement, le grillage était glissant, et elle se fit une légère frayeur en perdant au moins trente centimètres en un dixième de seconde. Elle retrouva son équilibre, puis reprit son ascension. Elle était arrivée au sommet du grillage, et en enjamba la crête, ricanant doucement, avant de descendre. Les gamins s’interrogeaient du regard : « comportement totalement insensé » correspondait parfaitement. Lamimille ne les avait pas vus, ni entendus. Elle se dirigeait vers le cabanon, qui lui rappelait vaguement une grange abandonnée, mais tout à coup s’arrêta net. Des aboiements ? Elle fit demi-tours, escalada le grillage avec une impressionnante rapidité, retomba de l’autre côté et recula de trois mètres, au moment où deux énormes danois s’abattaient sur le grillage, gueules béantes, aboyant sauvagement. Lamimille les jaugeaient, brave derrière le grillage sous le regard des sept gamins. Elle s’approcha lentement, et fixa son regard dans celui des chiens, qui aussitôt firent demi-tour en couinant. Puis elle se retourna, crânant.

« Vous avez vu comme je les ai matés ? C’est normal, je suis la meilleure du monde ! Wouah, vous en avez, des gros sacs ! C’est quoi ?

Eh bien, justement, on nous les a donnés pour qu’on te les donne.

Et qu’est-ce qu’il y a dedans ?

On nous a interdit de regarder.

Et vous n’avez même pas essayé ? Pfff…

On vient de nous les donner.

Je comprends mieux, alors… Et c’est qui, qui vous les a donnés ? Oh, c’est pas joli, comme phrase ! Je disais donc : et qui vous les a donnés ?

Euh… C’est un homme jeune habillé bizarre…

C’était surtout sa tête, qui était bizarre…

On aurait dit qu’il avait des écailles sur toute une moitié du visage…

Et des yeux noirs cernés…

Et des cheveux plaqués, comme des algues…

Il n’arrêtait pas de regarder partout, comme s’il avait peur…

Il ne nous a pas dit son nom…

Shádi ! s’écria Lamimille. Son nom, c’est Shádi. Il ne vous a pas dit le mien, à tout hasard ? Car je suis amnésique, et je ne sais pas comment je m’appelle.

Non, il ne nous a rien dit.

Il a juste donné une description…

Très, très ressemblante, j’imagine ? sourit Lamimille. »

Personne n’eut le temps de répondre, car à ce moment-là Myrélice, la mère d’Oscar et Lucie, arriva, surprise de voir les gamins encore rue Ruinart de Brimont, alors que le cours de danse des filles commençait dans un quart d’heure à l’autre bout de la ville.

« Vous allez être en retard ! Dépêchez-vous ! Mais qu’est-ce que c’est que ces sacs ? Vous ne comptez tout de même pas vous balader avec ça ! Où donc avez-vous été prendre ça ? Vous ne les avez pas volé, au moins ? Bon, donnez-les moi et ouste !

Non, ils ne les ont pas volés, intervint Lamimille. Mais ils doivent me les donner à moi, en main propre, là où peut être tranquille pour les ouvrir.

D’accord, mais ce sera après la danse, soit dans deux heures, le temps qu’ils reviennent.

Je crois que je pourrai attendre jusque-là, mais il faut mettre ces sacs en sécurité. Vous êtres sept, il y a sept couleurs différentes : retenez bien la votre, j’ai l’impression que ça a son importance, je ne sais pas pourquoi, d’ailleurs… »

Les gamins s’éloignèrent après avoir laissé les sacs. Myrélice aida Lamimille à les transporter dans la cave étrange du bar. Elles les entreposèrent sur une sorte de banc façonné naturellement dans la roche, puis ce fut l’heure pour Lamimille de rentrer. Elle dit à Myrélice de prévenir les gamins : ils devaient se trouver là quand elle reviendrait l’après-midi, mais ils ne devaient ouvrir les sacs seuls sous aucun prétexte. Quand elle demanda son nom à Myrélice, elle se creusa la tête : « ça ressemble à un nom que je connais : « Sirélys ». Mais impossible de me rappeler où j’ai déjà entendu ce nom ».

Un déjeuner et une sieste plus tard, elle ouvrirait ces mystérieux sacs donnés par Shádi. Pourquoi ne les lui avait-il pas donné en main propre ? Elle se dit qu’il avait dû voler ce qu’il y avait dedans. Où l’avait-elle rencontré et que représentait-il pour elle ? Tout cela demeurait si vague… La clé résidait-elle dans les sacs ? Encore un peu de patience et elle découvrirait certainement une chose importante : elle le sentait.

 

Publicité
Publicité
Commentaires
La Fleur d'Ecume
  • La Fleur d'Ecume va vous entraîner dans les méandres de mon cerveau : en effet, tout ce que vous allez lire, c'est un rêve que je fais (l'histoire est donc parfois étonnante !) Parés à plonger ? C'est parti !
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
Publicité