chapitre 17 : retour mouvementé.

Chapitre 17 : Retour mouvementé.

Après deux verres de Spéciale, Prune se rendit dans l’arrière salle, pour faire un saut chez Morgane. Elle devait à tout prix voir la fée, lui dire ce qu’elle savait, et lui demander conseil. Arrivée dans la Forêt d’Argent, elle se mit à chanter la chanson Loin de Brocéliande, signe de reconnaissance avec la fée. Cette dernière ne tarda pas à paraître.

« Je sais tout, commença Prune.

_ Tout, non. Mais j’avoue t’avoir un peu surprotégée.

_ Où est le passage vers Yiyor ? Et vers le fin fond du fin fond de l’abîme ? Et où il est, l’autre, que je le ratatine ?

_ Prune…Tu ne peux pas encore l’affronter… Il te manque encore quelque chose.

_ Quoi ? demanda Prune abruptement.

_ L’essentiel…Quand tu es née…Non, je ne peux pas te le dire… Ne t’énerve pas, je ne sais pas ce qui s’est passé. Je sais seulement que ta force a fait peur ; elle a été scellée jusqu’à ce que ses éléments se manifestent.

_ Et ce sera quand ? demanda Prune avidement.

_ Si ça pouvait arriver le plus tôt possible… Je ferai tout ce que je peux pour que le sceau se brise très bientôt… Surtout, si tu as un problème (et tu risques d’en avoir ; je préfère te prévenir : des sbires de l’imposteur sont à tes trousses, avec des armes humaines et magiques), va dans la Forêt. Au plus profond de la Forêt, même si tu n’es jamais allée aussi loin. Tu y seras en sécurité. Maintenant, va. Rentre à Siudka, et fais attention à toi. »

La fée disparut, et Prune fit demi-tour.

Les coquilles de l’université de Siudka se dressaient sur le ciel bleu. Prune était enfin arrivée, avec la bagatelle de deux heures de retard… Et bien sûr, elle croisa Berthille Quintilien, qui ne manqua pas de lui faire remarquer son retard.

« Je sais, se défendit la jeune fille, mais j’ai eu quelques problèmes, depuis trois jours… Le climat électoral est lourd, et…

_ Bien sûr, je comprends : les élections… C’est très important. Surtout là… Vous avez raison, c’est très lourd… Je sais que je ne dois pas parler politique avec mes étudiants, mais…Que pensez-vous de cet Aruvah Tuhra ? Moi, il me fait peur.

_ Quoi ? Cet espèce de résidu de crotte de pigeon se présente ? Je comprends pourquoi c’est lourd, alors ! Sans vous alarmer…Vous avez raison d’avoir peur. Et puis, je vous dis ça, mais c’est confidentiel, ne le répétez pas : son vrai nom, c’est Morgaéus, dit l’infâme. Il a voulu tuer le vrai Aruvah. Et… »

Un éclair fulgurant lui coupa la parole. Deux sbires de l’imposteur donnèrent la chasse à Prune, tandis que Berthille courut se réfugier dans les locaux. Prune réussit à semer ses poursuivants grâce à sa parfaite connaissance des ruelles et passages secrets de Siudka. Des applaudissements attirèrent son attention : un meeting politique ! Chouette, elle adorait ça ! Elle s’approcha, mais se figea quand elle reconnut, à l’angle du podium, un sosie de Michael Jackson…elle s’était presque jetée dans la gueule du loup. Elle recula prudemment dans une ruelle sombre, et se dirigea vers l’Avenue des Pirates.

Elle se dépêchait de gagner le bar des Labordage, pour savoir si on avait rapporté sa voiture. Elle y passa tout l’après-midi, à jouer au poker avec Sacha (qui lui apprit que sa deux-chevaux avait été confiée à Jean). Enfin, alors que la nuit commençait à tomber, elle décida de rentrer enfin chez elle.

Des images sur les écrans de télévisions du magasin Téléviza l’interpellèrent : c’était Toultsatchouk ! Et les choses avaient bougé : malheureusement, il n’y avait pas de son. Mais on voyait très bien la ville, les tours militaires, érigées par Morgaéus, en ruine, les Toultsatchouvki faire la fête dans les rues, Oléna, Iouri, Irina, Svetlana… Et Shádi ! Elle dévorait des yeux le visage du jeune Kourchédan, dont les yeux brillaient encore plus que ceux d’Olena. Shádi viendrait-il à Siudka bientôt ? Elle était plongée dans cette heureuse pensée, quand des coups de feu retentirent. On lui tirait dessus ! Encore une nouvelle attaque ! Décidément, elle devrait toujours fuir… Une balle siffla très près de ses oreilles, et Prune se mit à courir, de toutes ses forces, vers les portes de la ville, vers le port, n’importe où. Les rues défilaient, les balles pleuvaient, la nuit tombaient…