Chapitre 58 : les trois lames.

Chez Morgane, dans une salle sous-terraine, se tenaient une nouvelle réunion. Au centre de la table en forme de ballon de rugby, il y avait les deux poignards rapportés par Prune. Etait-ce un effet de son imagination, ou parce qu’elle s’ennuyait, ou à cause de la fatigue ? Prune avait l’impression que les deux poignards bougeaient. Elle profita d’une pause dans la conversation pour prendre la parole, les yeux toujours rivés sur le centre de la table.

« Pendant le grand conseil océanique j’ai entendu un nom bizarre qui ressemble un peu au mien… Tzali-Sméruga… Qu’est-ce que c’est ?

Tzali-Sméruga… soupira Sliéta… Imagine-toi un volcan comme le Stromboli entrant en éruption au moment-même où une tempête ferait rage en mer tout autour de son cône et qu’un violent orage éclaterait, le tout agrémenté d’un tremblement de terre, et tu auras une petite idée de ce qu’est Tzali-Sméruga.

Cool ! murmura Prune admirative.

Cool ? Non, pas « cool », comme tu dis. C’est extrêmement dangereux. Un pouvoir immense et terrible, que tu ne dois en aucun cas utiliser à la légère.

Quand tu dis « tu », c’est le « tu » équivalent de « on » ou c’est pour me désigner moi personnellement ?

A ton avis ? »

Prune ne répondit pas. Ses yeux se mirent à briller, et elle sourit d’une manière presque carnassière.

« Les éléments sont presque tous réunis ; il nous manque une lame et tout sera prêt pour… Pour ce que l’on sait, intervint Morgane.

La lame manquante est ici, dit Aruvah. Les deux autres l’ont cherchée et l’ont déjà trouvée. Regardez comment elles semblent vouloir s’orienter comme une boussole. »

Morgane réfléchit quelques instants, puis son visage s’éclaira.

« Prune, depuis combien de temps as-tu ton couteau de plongée ?

Oh, ça fait longtemps ! Je l’ai depuis… Depuis… J’ai l’impression de toujours l’avoir eu, à vrai dire.

Mets-le sur la table. »

Prune mit sur la table son couteau de plongée, qui aussitôt sembla glisser vers les deux autres poignards. Il y eut un éclair, puis les trois lames fusionnèrent pour former une fleur d’écume, qui s’éleva, tournoya d’abord lentement puis de plus en plus vite ; on voyait un tourbillon de couleurs, d’argent et d’or ; enfin les lames se séparèrent : le couteau de plongée rejoignit de lui-même sa gaine attachée comme toujours à la jambe de Prune, le poignard fabriqué par Corail se planta sur une carte pile à l’endroit représentant l’île de Malditta, et le poignard de Koraï vint se ficher dans la fenêtre qui faisait face à la mer.

« Il te faut retourner à Malditta, reprit Sliéta, et y trouver une pierre comportant une entaille nette. Ton couteau te guidera : il sera attiré par cette pierre de même qu’il a été attiré par les deux autres lames. Il te faudra chercher sur toute l’île, mais aussi en-dessous si besoin. Quand tu auras trouvé, reviens ici. Il me faut, pour ma part, retourner à Oluleï. Il se passe des choses tellement surprenantes ! Bon courage, Prune, et fais vite !

Fin de la

dixième partie.

Chapitre 58 : les trois lames.

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