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La Fleur d'Ecume
18 août 2011

Chapitre 51 : les Portes.

Chapitre 51 : les Portes.

 

Le phœnix de tout à l’heure revint virevolter autour de Prune.

« Bravo, encore un sceau rompu. Tu dois être capable de dire ton nom presque en entier, désormais.

– Prune Biélouchka Andodromtsa Okéanou-Malka Perle-de-Lune Tamashuka Daurade-Rose Samoa Fructidora Lolena Rodiballaïlah… C’est tout ce que je sais.

– Oui, il t’en manque encore, mais tu as tout le début, maintenant ! Tu arrives à la Léhéména. Bon appétit ! »

L’oiseau s’envola au loin. « Bon appétit ? » s’étonna Prune. Pourquoi m’a-t-il dit ça ?

Ils franchirent des portes qui ressemblaient à de grands paniers. Le sol était d’une jolie couleur de blé mûr. Des arbres touffus se dressaient tout le long du chemin.

« C’est quoi, ce qui pend des arbres ? » s’enquirent les mi’ikih.

Prune s’approcha d’un des arbres. Pas d’erreur possible : ce qui pendait des arbres, c’était du pain.

« Je comprends le nom du lieu[1], sourit-elle en décrochant un petit pain aux céréales, et je comprends pourquoi le phénix a dit « bon appétit » ! Mangez, c’est du pain ! »

Ils traversèrent cette minuscule région assez vite et très agréablement. Ils arrivèrent à de très hautes et lourdes portes fermées aux dessins macabres. Des murs hérissés de pics acérés empêchaient toute tentative de contournement des portes. Prune consulta son plan : c’était bien là, mais rien n’indiquait la façon d’ouvrir ou de franchir ces portes.

« Je vais voir ce qu’il en est », dit Prune avant de prendre son apparence dragonesque. Elle fut surprise de devoir s’y prendre à deux fois pour y parvenir, mais finalement s’envola. Mais au-delà du mur et des portes, c’était le désert. Dépitée, Prune revint au sol.

« Rien. Le désert à perte de vue. Franchement, qu’est-ce qu’on fait là ?!

– Il doit bien y avoir quelqu’un pour nous accueillir et ouvrir ces portes…

– Ils ne savent peut-être pas encore qu’on est là…

– Eh ! Ouvrez-nous ! Oh !  » hurlèrent les mi’ikih.

Ils se mirent à faire un vacarme assourdissant et à donner de violents coups de pieds et de poings dans les portes, qui résonnaient sinistrement. Soudain, les portes s’ébranlèrent et commencèrent à s’ouvrir. Les mi’ikih hurlèrent de joie ; Prune esquissa un sourire à peine visible. Un homme d’assez grande taille, aux longs cheveux bleu-turquoise, aux beaux mais tristes yeux violet foncé, vêtu d’une armure rappelant le monde marin et armé d’un trident argenté, se tenait là.

« Nous ne vous attendions pas si tôt, dit-il d’une calme voix grave. Nous sommes désolés de ne pas vous avoir accueillis comme il se devait. Mais nous allons tout faire pour que vous soyez traités avec le soin et l’attention qui vous sont dus.

– Nous avons un mi’iki blessé, répondit Prune.

– Entrez vite », reprit l’homme.

Prune et les mi’ikih découvrirent alors à leur grande surprise que les portes ne donnaient pas sur un désert, mais sur un somptueux palais. Dès que tous eurent franchi les portes, celles-ci se refermèrent. Des personnes s’affairèrent pour soigner le blessé. Chacun fut conduit dans une chambre.

« Reposez-vous, dit l’homme qui les avait accueillis ; nous nous retrouverons ce soir dans la Salle du Conseil. »

La chambre de Prune était très confortable, ombragée, avec un lit douillet, une armoire en bois avec un grand miroir, une table sur laquelle étaient posées une corbeille de fruits qu’elle n’avait encore jamais vus et un grand verre d’une boisson verte qu’elle ne connaissait pas. Elle goûta le tout, et trouva cela fort bon. Une porte donnait sur un cabinet de toilette, où avaient été préparés gants, serviettes, brosse à dents et vêtements propres exactement à sa taille. Pas mal, dit-elle… Et pour se détendre, elle s’amusa à présenter la chambre façon publicité.

« L’hôtel de Chépahou, que vous finirez par trouver après un périple de plusieurs jours. Vous pourrez vous y reposer en toute tranquillité ! Lit confortable (elle se jeta en arrière sur le lit)… Non, très confortable, rafraîchissements exotiques (elle mangea un petit fruit et but une gorgée de boisson)… Excellents, vaste armoire (elle ouvrir l’armoire en bois) … Très vaste armoire, où vous pourrez entreposer toutes vos affaires, cabinet de toilette avec douche, WC, lavabo, avec linge et brosse à dents fournis (elle ouvrir le placard du cabinet de toilette)… Dentifrice, shampooing, gel douche, rasoir électrique, déodorant garnissant le placard, décoration simple mais de bon goût, et surtout accueil par un très, très beau gars !... Bon, je vais dormir un peu, moi, ça vaut mieux. »

Elle s’endormit et se réveilla alors que le soleil dardait ses rayons vespéraux, donnant à la chambre une teinte vermillon. Elle se rendit au cabinet de toilette, et en ressortit au bout d’une demi-heure, rafraîchie, vêtue d’une somptueuse robe bleu-vert foncé et rouge orangé, d’un pantalon de même teinte, avec une longue ceinture bleu-vert foncé, de chaussures en bois peint des mêmes couleurs, et d’une riche coiffe. Quelques discrets petits coups furent donnés sur la porte de la chambre.

« Vous pouvez ouvrir ! » cria Prune d’un ton jovial.

Une femme vêtue de violet passa la tête : « le roi Mylko t’attends dans la Salle du Conseil, je vais t’y mener. »

Elles empruntèrent des couloirs, des escaliers, puis un passage secret qui donnait sur la salle du conseil. Un rideau constitué de fils de soie faisait office de porte. Prune aperçut tous les mi’ikih, vêtus des mêmes vêtements qu’elle mais en jaune et violet, assis en ellipse sur des coussins, le roi (l’homme qui les avait accueillis tout à l’heure) était assis à une des extrémités de l’ellipse, et à l’autre extrémité un coussin l’attendait. Prune passa entre les fils de soie. Le roi se leva, s’inclina devant Prune et l’invita à s’asseoir.

« Wouah, dit la jeune fille aux mi’ikih. Vous êtes beaux, comme cela, ça vous va bien.

– Ouais mais on voit moins nos muscles », regretta Florent.

Manon et Julie hochèrent la tête en soupirant entre leurs dents. Pendant ce temps, Mylko avait pris une louche, ouvert la vasque qui était devant lui, et remplissait quatorze écuelles qu’il distribua aux mi’ikih.

« Euh… Qu’est-ce que c’est exactement ? demanda Valentin.

– On dirait du vin, répondit Benjamin.

– Ce n’est pas du vin, dit Mylko. Buvez.

– Bah pourquoi j’en ai pas, moi ? s’indigna Prune.

– Parce que tu es Céruléenne, expliqua le roi. »

Prune maugréa et lui tira discrètement la langue.

« Reposez-vous bien cette nuit, mi’ikih, car vous repartez demain.

– On va encore traverser tout ça ?

– Non, vous passerez par le souterrain qui relie ce palais à la tour d’Olukiba.

– Il y a un souterrain qui relie ce palais à la tour d’Olukiba ? s’enquit Prune lentement, abasourdie, d’une voix qui dissimulait mal son irritation.

– Oui, bien sûr…

– Et il était inutilisable, c’est ça ? tenta de se rassurer la jeune fille. Il vient d’être réparé et c’est pour ça qu’ils pourront passer par là. C’est ça ?

– Non, il a toujours été utilisable.

– Mais il est beaucoup trop long et l’atmosphère y est irrespirable, non ? ajouta-t-elle d’une voix de plus en plus forte.

– Ce souterrain est parfait. Il y fait bon, et on met deux heures en marchant lentement pour rejoindre la tour d’Olukiba.

– Deux heures ? s’emporta Prune. ON A MIS PLUSIEURS JOURS POUR PARCOURIR UN CHEMIN POURRI SOUS UN SOLEIL DE PLOMB, ON A FAILLI SE FAIRE TUER, UN MI’IKI A ETE BLESSE, ON A RENCONTRE DES BESTIOLES BIZARRES QUI AURAIENT PU NOUS DEVORER, DES GENS TOUT AUSSI BIZARRES QUI…

– IL LE FALLAIT POUR QUE TU TE REVELES EN TANT QU’ANDODROMTSA ! la coupa Mylko.

– Qu… Qu’arrive-t-il aux mi’ikih ? s’inquiéta soudain Prune, voyant que ces derniers avaient sombré dans un profond sommeil.

– Ne t’inquiète pas, je leur ai donné un puissant somnifère, pour que nous puissions parler de choses qui ne les concernent pas. Tu vas t’entraîner avec Sliéta.

– Chouette !

– Ensuite tu retourneras à Siudka. Un conseil doit statuer sur les dates, une fois cela fait tu seras recontactée.

– Dans combien de temps ? Qui participe à ce conseil ? Les dates de quoi ? Qui me recontactera ?

– Oh, doucement ! Je n’en ai aucune idée.

– Et… Aurais-tu par hasard une idée quant aux bestioles nocturnes ? demanda la jeune fille après un temps de silence. Personne n’a voulu m’en parler, pas même Olukiba.

– Olukiba… répéta Mylko en soupirant d’un air mélancolique, les yeux perdus dans ses pensées, les doigts entortillant ses longs cheveux.

– Oooooh, il y a mammouth sous gravillon ! s’exclama Prune les yeux brillants.

– Si seulement… Mais là n’est pas la question. Qu’as-tu remarqué par rapport à ces bestioles nocturnes.

– Aucune pilosité, aucune pigmentation, les yeux rouges… Elles me font penser à un film avec Will Smith… ça a un rapport ?

– Pas exactement, mais il y a des points communs.

– J’ai ramassé deux dents et une griffe qui sont dans mon sac. C’était resté planté dans notre abri de nuit. D’après la forme des dents et de cette griffe, ce sont des animaux genre lions ou truc comme ça, mais après on a traversé une autre région où on aurait dit des humains…

– Oui, se furent des humains autrefois, et des chiens, et des félins. Les Morgaéusiens avaient souvent de grands félins en guise d’animaux domestiques.

– Les Morgaéusiens ? Alors toutes ces créatures sont… Comment se fait-il ?

– Lors de la destruction de Morgaéusia par Perle-de-Lune, certains humains, chiens, et félins sont passés par le Puits Interdit. Ce puits existait du temps où la ville s’appelait encore Yiyor et était sous la protection de Fructidora. On pouvait alors voyager d’Oluleï à Yiyor sans passer par l’un des sept volcans. Mais c’est précisément dans ce puits que Morgaéus a rattrapé Fructidora et l’a tuée. C’est aussi là qu’il massacra Anaxa. Avant de mourir, alors qu’elle agonisait, Anaxa frappa le puits de malédiction : tout être qui tenterait de se rendre à Oluleï en passant par ce puits en serait atteint.

– Le Torrent Argenté d’Ecume et de Rage… J’ai vu ce nom sur la carte.

– C’est le puits. Il a changé de nom quand la vague de Perle de Lune a ravagé la ville. Ce fut si violent que depuis vingt ans, ce torrent coule, juste derrière ce Palais.

– Mais comment les autres ont-ils pu passer, alors ?

– Morgaéus a vu la vague venir, il a fait passer tous ses meilleurs sbires avant que la vague ne s’abatte ; les animaux, eux, ont réagi par instinct, c’est tout.

– Si seulement cet imbécile de Morgaéus était aussi passé par le puits…

– Il a craint d’y passer, et s’est contenté de prendre une ruelle de Sliéta, accompagné de quelques uns de ses suivants.

– S’il y était passé je l’aurais massacré à l’arrivée ! rugit Sliéta, qui était sortie de derrière un rideau. Prune, repose-toi bien cette nuit. Nous commencerons l’entraînement demain matin. »



[1] Le nom « Léhéména » est tirée de l’hébreu lehem, le pain.

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  • La Fleur d'Ecume va vous entraîner dans les méandres de mon cerveau : en effet, tout ce que vous allez lire, c'est un rêve que je fais (l'histoire est donc parfois étonnante !) Parés à plonger ? C'est parti !
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